Rencontre autour du houblon bio de Nouvelle-Aquitaine

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La première rencontre professionnelle autour du houblon bio de Nouvelle-Aquitaine a été co organisée par trois acteurs régionaux de cette filière : INTERBIO Nouvelle-Aquitaine et HOPEN Terre de Houblon et HOUBLON Nouvelle-Aquitaine, en partenariat avec le Festival BLIB, le bar 1001 bières et avec le soutien de l’Etat et de la Région Nouvelle-Aquitaine.

Chacun d’entre nous à son niveau met en œuvre des actions afin de développer une offre en houblon bio régional à destination des brasseurs et souhaite vous les faire découvrir. Nous sommes convaincus du potentiel d’innovation de notre territoire pour produire des matières premières biologiques très intéressantes !

Les acteurs du houblon bio en Nouvelle-Aquitaine


L’entreprise créée en 2018, HOPEN s’engage dans l’implantation de houblons en France pour répondre à la demande exponentielle des nouveaux artisans brasseurs. HOPEN accompagne des agriculteurs à la diversification de leur culture grâce au houblon. Elle est un véritable intermédiaire entre les producteurs et les brasseurs grâce à la première plateforme de vente directe de houblon français bio.

Une association interprofessionnelle régionale des filières biologiques, qui fête ses 20 ans cette année. INTERBIO Nouvelle-Aquitaine c’est aussi 300 membres, 13 salariés, des actions de structuration des filières bio et de promotion des produits qui en sont issus. Un travail en commissions (avec transversalité si pertinent) : PPAM (L’union des Professionnels des Plantes à Parfum, Aromatiques et médicinales) dont le houblon et Artisans dont un groupe de brasseurs.

HOUBLON Nouvelle-Aquitaine est une association indépendante, à but non lucratif, dont l’objectif est de réunir les producteurs, les utilisateurs, et les acteurs du houblon en Nouvelle-Aquitaine. L’association a vocation à regrouper aussi les brasseries qui sont dans une démarche locale, les centres de recherche et organismes de développement agricole.

État des lieux : le marché du houblon bio en Nouvelle-Aquitaine


Partons du panorama national. La France est le premier pays européen en nombre de brasseries. On en compte environ 2300. Au niveau de la consommation, 70% des bières consommées sont des bières françaises, et les bières artisanales représentent 7 à 8% des parts de marché. Si on s’intéresse plus particulièrement aux bières bio, on constate que 30% de ces brasseries artisanales produisent de la bière bio, et depuis le début de l’année 2022, 474 brasseurs se sont notifiés à l’Agence Bio.

En se concentrant sur la région Nouvelle-Aquitaine, ce sont environ 250 brasseries que l’on dénombre. La production de bière s’élevait à 110 000 hl/an en 2021. La Région NA est la 3e région en nombre de brasseries, derrière l’Auvergne-Rhône-Alpe et l’Occitanie. Sur ces 250 brasseries, 188 sont artisanales et indépendantes (75%) et au moins 60 sont des brasseries bio (mixtes ou 100% bio). Le marché de la bière est en croissance dans la région, citons en exemple le Lot-et-Garonne (47) dont le nombre de brasseries a été multiplié par 5 entre 2017 et 2021.

On ne peut pas parler de la filière brassicole sans s’intéresser rapidement à la production amont. La bière, c’est du malt obtenu à partir d’orge de brasserie. En Nouvelle-Aquitaine, il y avait en 2020 environ 50 producteurs d’orge bio, pour environ 470 ha. Cela représente 18 à 20% de la production totale d’orge bio français. Une partie de cette orge bio est transformée localement à la malterie de l’Ouest, à Bernay-Saint-Martin (17). Un évènement dédié à la filière brassicole bio régionale dans son ensemble est prévu le 26 avril 2023. Il s’agit du Forum Val Bio Ouest, sur le site de Val Bio Ouest à Saint Jean d’Angély (17). Le thème est « la filière brassicole bio : du champ à la chope », et cette journée sera organisée autour de conférences plénières, de visites d’entreprises et de rencontres entre professionnels.

Ce qui a réuni les différents acteurs lors de cette journée à Bordeaux, c’est le houblon. En Europe, le houblon représente 31 000 ha (soit environ 50% de la surface mondiale), dont près de 20 000 ha (64%) se situent en Allemagne. La France c’est seulement 550 ha, dont 96% sont cultivés en Alsace.

Autre constat, 70% du houblon utilisé en France provient de l’export. Il se dessine clairement que la demande en houblon excède très largement l’offre au niveau national. Dans cette offre nationale, en 2020 le houblon bio était cultivé sur une surface totale de 156 ha, soit 125 fermes (bio ou en conversion). Le houblon bio représentait 22% des surfaces totales de houblon, soit près d’un quart de l’offre national en bio. Les chiffres récents de l’Agence Bio estiment la surface en houblon en 2021 à 204 ha, soit une augmentation des surfaces de 30% ; il y a donc une vraie dynamique de cette filière. En Nouvelle-Aquitaine, l’Agence Bio dénombrait 5 ha de houblon bio ou en conversion en 2020, tandis que ce chiffre grimpe à 19 ha en 2021 (5 ha en bio et 14 ha en conversion). Loin derrière le Grand Est (98 ha bio ou en conversion), la Nouvelle-Aquitaine passe néanmoins en 2e position. C’est la région française qui a la plus forte dynamique de conversion en houblon bio.

Sources : ORAB, Agence Bio

La filière houblon bio est émergente. Elle est certes tirée par le développement de la demande en production nationale, mais demande à être structurée au niveau national comme au niveau des territoires. Elle fait d’ailleurs l’objet d’une étude lancée par l’Agence Bio, dont les résultats devraient être obtenus à l’hiver 2022.

NB : les chiffres cités proviennent des sources suivantes : Agence Bio, Brasseurs de France, France AgriMer, La Coopérative Agricole, ORAB, Projet Amertume, SNBI.

Itinéraire technique du houblon en agriculture biologique


Le houblon est une plante pérenne. Elle est implantée pour plus de 15 ans. C’est l'inflorescence qui intéresse tout particulièrement le brasseur, car elle détient des molécules spécifiques : les acides alpha et bêta, responsables de l’amertume dans la bière, et les huiles essentielles qui vont donner l’aromatique.

La culture du houblon bio a des spécificités de par le fait qu’aucun traitement n’est possible avec des intrants chimiques et la fertilisation doit être d’origine organique. Le producteur est alors amené à adapter son itinéraire technique et appréhender sa plantation d’une façon particulière.

Tout d’abord, nous allons voir la structure avec un schéma réalisé par HOUBLON Nouvelle-Aquitaine :

Le culture du houblon est palissée, elle peut monter jusqu’à plus de 8 mètres chaque année. Ce sont des installations importantes, qui demandent un investissement à l’hectare entre 25 et 35 000 euros.

En moyenne en France les producteurs implantent 3 hectares pour les néo houblonniers et autour de 10 hectares pour les producteurs implantés dans les régions traditionnelles.

On peut mettre en parallèle ces chiffres avec la moyenne de surface d’une houblonnière américaine qui est de plus de 180 hectares ! En bio, les plus petits dimensionnements permettent de limiter la concentration et l'expansion des maladies.

Au cours de l’année le houblonnier sera amené à réaliser différentes tâches dans sa houblonnière : la taille de la souche, la pose des fils et la mise au fils courant mai, le buttage, les traitements puis la récolte et le séchage des cônes de houblon à partir de fin août !

Les investissements peuvent être importants du fait de l’utilisation de matériels spécifiques. En moyenne, pour l’installation de 3-4 hectares et l’achat de matériels spécifiques (dont du matériel d’occasion) le producteur investira entre 150 et 200 000 €.

Ceci est à rapprocher du temps passé sur la houblonnière. En agriculture biologique, nous pouvons considérer que le producteur passe environ 400 h / ha, entre les opérations manuelles (pose des fils et mise au fils) et motorisées (traitement, travail du sol et récolte), il faut prendre en compte quelques contraintes de la culture en bio. Nous pouvons donc nous questionner sur la rentabilité d’une telle culture avant de se lancer !

Les qualités du houblon


Quand on parle de qualité, les critères peuvent être très différents d’un acteur à l’autre au sein d’une même filière. Comment construire un produit final dont la qualité corresponde aux attentes du brasseur ?

Lors de l'événement lorsque l’on parle de qualité, les mots qui sont les plus ressortis sont “aromatique”, "fraîcheur", et “houblon local”.

La qualité du point de vue producteur

La première caractérisation de la qualité est la certification FranceAgriMer obligatoire et réglementaire. Elle garantit une qualité minimale liée au mode de culture, c'est-à-dire professionnelle et mécanisée. Le houblon doit présenter un certain taux de graine (si il y en a trop cela affecte la qualité organoleptique, le houblon a un goût aillé), de tige et de feuille, et un taux d’humidité contrôlé (pour la conservation du produit dans le temps). Elle permet aussi d’avoir une traçabilité parfaite de chaque lot (localisation des parcelles, rendement des parcelles, surface et variétés). Ces informations permettent aussi à la filière d’avoir du recul sur la production nationale.

Ensuite l’acheteur final ou l’intermédiaire de vente peut exiger une autre batterie de caractéristiques qui garantiront une qualité organoleptique : couleur du houblon, taux d’effeuillage du houblon, dosage des acides alpha et bêta et des huiles essentielles.

C’est la présence de maladie, la qualité de l’opération de séchage et de pelletisation qui influent notamment sur ces critères de qualité.

Enfin de nouveaux besoins émergent aujourd’hui : on demande au producteur de cultiver dans le respect de l’environnement. Les labels tels que AB, HVE peuvent aiguiller sur les modes de culture utilisés.

Il reste un point central dans la gestion de la qualité entre le producteur et le brasseur, quelle caractérisation pour que les deux parties puissent se comprendre? Est-ce que les analyses des huiles suffisent ? Ou bien faut-il aller plus loin dans la transformation du produit ?

  • “sniffing” des cônes frais post récolte : cela ne traduit pas le produit final car il reste l’opération de séchage,
  • analyses sur houblon en cône ou pellet : attention à ce que les analyses soient réalisées sur les pellets sinon ça ne prends pas en compte l’opération de pelletisation,
  • brassage de SMASH, et distribution d'échantillons au brasseur. Cela semble idéal mais c’est un gros investissement en temps pour le producteur,
  • infusion dans de l’eau ou du moût (à réaliser par le brasseur) : solution complémentaire des analyses assez facile à mettre en œuvre.

Enfin quelle place veut on donner au houblon français ? Les célèbres variétés américaines (Citra, amarillo, simcoe…) super chouchou des brasseurs ne pouvant pas être produites en local, l’offre française est parfois jugée ringarde sur le plan aromatique.

Pour autant, pour le consommateur, ce qui prime dans le choix d’achat d’une bière c’est le goût. Puis suivent l’origine des matières premières, le prix et le packaging !

Atelier de dialogue entre producteurs et brasseurs


Nous avons pu précédemment partager et comprendre les contraintes de chaque métier et de différents ordres : techniques, humaines, financières, réglementaires, commerciales… Si nous avons peu de prises sur certaines d’entre elles à notre échelle (aspect réglementaire), nous avons des marges de manœuvre sur de nombreuses autres.

Nous proposons aux participants d’imaginer des actions à mettre en place pour développer les partenariats locaux en prenant en compte les contraintes de chacun à travers deux problématiques.

Problématique n°1 : Quelles solutions entre houblonniers et brasseurs régionaux pour sécuriser les débouchés et les approvisionnements ?

Le premier axe pour répondre à cette problématique concerne la structuration de l’offre régionale par des actions collectives. Voici les propositions apportées par les participants :

  • la coopérative locale,
  • la recherche variétale,
  • la création de smashs régionaux,
  • la formation,
  • travailler tous ensemble dans une association régionale,
  • décrire ensemble la qualité du houblon bio de Nouvelle-Aquitaine,
  • R&D conjointe : quels produits finis pour s’adapter aux nouvelles recettes,
  • connaître le besoin global des brasseurs artisanaux à une échelle territoriale,
  • avoir une grande gamme de variétés, un catalogue des houblons régionaux.

Le deuxième axe vise à comprendre comment on peut établir des partenariats entre producteur et brasseur selon les participants :

  • collaboration entre un brasseur et un houblonnier pour créer une recette éphémère,
  • travailler avec un producteur local en direct,
  • stock tampon pour faire découvrir et permettre aux brasseurs de tester les houblons,
  • développer des recettes communes houblonnier / brasseur sur un terroir spécifique,
  • parrainage.

Problématique n°2 : Quelles solutions entre houblonniers et brasseurs régionaux pour valoriser la filière houblon locale auprès des clients, des pouvoirs publics ?

Quelles sont les actions de promotion que nous pouvons envisager selon vous ?

  • Communiquer sur les brasseurs et producteurs sur les réseaux sociaux, comme mettre en avant les belles réussites « produit » et/ou commerciales réalisées sur la base de partenariats locaux, faire des interviews brasseur / producteur,
  • Organiser des évènements, être présent sur des salons professionnels en lien avec la filière brassicole,
  • Ouvrir les portes et faire découvrir la filière,
  • Lancer des partenariats commerciaux avec les débits de boissons (enseignes, parasols…),
  • Dégustations dans différents points de vente avec brasseurs et houblonniers présents.

Cet article a été co-rédigé par HOPEN, INTERBIO Nouvelle-Aquitaine et avec des informations de la conférence de HOUBLON Nouvelle-Aquitaine. Nous remercions le festival BLIB et le bar 1001 Bières à Bordeaux, pour leur contribution dans l’organisation.